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Les mûriers blancs maintiennent la production des chèvres en été

Les mûriers représentaient les deux tiers de la ration fourragère des chèvres.

Une étude conduite à la ferme expérimentale du Pradel en Ardèche montre que les performances des chèvres consommant les feuilles de mûriers blancs rivalisent avec celles mangeant du foin de luzerne.

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Désormais, en été, les chèvres de la ferme expérimentale du Pradel en Ardèche sont au régime de mûrier blanc. Ces arbres sont les seuls à pouvoir fournir une ressource fourragère verte à cette date de l’année. Les 2 ha, plantés initialement à la fin des années 1990 pour nourrir des vers à soie, sont régulièrement étudiés pour enrichir les connaissances sur le potentiel de ce fourrage. En 2021 et 2022, le projet APaChe (arbres pâturés par les chèvres) a mis en évidence ses atouts dans l’alimentation des chèvres.

« La quantité de lait produite par les chèvres conduites sur les mûriers a été maintenue entre 3,3 et 3,5 kg de lait à 170 jours de lactation », précise Claire Boyer de l’Institut de l’élevage, en charge du suivi de ce programme. C’est un niveau équivalent à celui du lot « témoin » conduit en bâtiment avec du foin de luzerne.

Les 2 ha de mûriers de l’exploitation ont accueilli un lot de 24 chèvres lors de la deuxième moitié du mois de juillet durant deux années consécutives. Les animaux pâturaient de 8 h à midi et rentraient ensuite dans le bâtiment à cause des fortes chaleurs. Elles recevaient du foin de luzerne le soir à l’auge comme le lot témoin. Les deux lots recevaient 250 g d’un concentré azoté du commerce à 26 % de matière azotée totale (MAT) et 500 g de maïs.

Même si les chèvres ne séjournaient que 20 à 30 % de leur temps quotidien sur la parcelle, les mûriers représentaient les deux tiers de leur ration fourragère. « L’analyse de leurs fèces a permis de le mettre en évidence », souligne Claire Boyer.

Riche en MAT

L’examen approfondi des feuilles de l’arbuste a montré aussi que, comme la luzerne, ce sont des plantes riches en MAT. En 2022, le foin de luzerne en contenait 14,9 g/kg de MS et le mûrier 13,9 g/kg de MS. La digestibilité du mûrier était toutefois meilleure. La même année, elle était de 89 %, contre 57 % pour la luzerne. Le mûrier se distingue aussi par son taux de matière grasse particulièrement élevé : 57 g/kg de MS contre 14 g/kg de MS pour le foin de luzerne. En moyenne, le mûrier est deux fois plus riche en matière grasse que le foin de luzerne.

Résultat, le lait du lot « mûrier » est riche aussi bien en taux butyreux (TB) qu’en taux protéique (TP). En 2021, le TB du lait « mûrier », à 39 g/kg en moyenne, était supérieur de 9 g/kg à celui du lait « luzerne ». En 2022, l’écart atteignait 9,6 g/kg de lait en moyenne. La valeur énergétique supérieure a favorisé la fermentation ruminale. Le TP atteignait 32 g/kg de lait en moyenne en 2021 pour le lot « mûrier », soit 2 g/kg de plus que pour le lot « luzerne ». (+ 1,5 g/kg de lait en 2022).

Le taux d’urée du lait était aussi en faveur du lot « mûrier ». Il s’affichait autour de 300 mg/l contre 450 g/l pour le lait « luzerne » en moyenne sur les deux années, dénotant une meilleure utilisation de l’azote dans le rumen.

Les picodons conservent leur typicité

La richesse du lait « mûrier » a favorisé le rendement fromager. Il est supérieur de 1 à 2 kg pour 100 kg de lait par rapport au lait « luzerne ». « Pour autant, les picodons AOP produits conservent leur typicité, assure Claire Boyer. Les fromages ont subi des tests triangulaires avec des consommateurs lambda et des dégustations par un jury d’experts formé par le laboratoire de l’Idele. Ceux-ci ont jugé les fromages sur 28 descripteurs (goût, odeur, texture, aspect…) et constaté que les caractéristiques n’étaient pas altérées. »

Les arbres apparaissent donc comme un bon complément pâturable en été. Au Pradel, un deuxième passage des animaux sur la parcelle est même réalisé au cours de l’automne. Même si la productivité de la parcelle mûrier est modeste, autour de 1 t de MS par ha sur la pousse estivale au Pradel, elle reste la seule ressource disponible à ce moment-là. La densité de plantation sur le site est toutefois faible (autour de 3 000 pieds/ha) et de pousse assez hétérogène.

Des références pour la taille

Une nouvelle parcelle a été implantée plus densément (10 000 pieds/ha). Plusieurs essais ont débuté en 2023 pour apporter des références sur la taille et l’implantation des arbres en élevage. Cette année par exemple, sur les mûriers têtards, différentes tailles ont été réalisées : l’une à ras avec la tronçonneuse ou un sécateur et une autre en gardant une partie des branches entre 40 et 50 cm. Les cépées (taille à ras du sol) ont été coupées avec la débroussailleuse. Il s’agit d’étudier aussi le temps de travail. « La productivité était comparable à celle de 2022, note Claire Boyer. Les arbres les plus productifs affichent un rendement autour de 3 t de MS/ha en été. La repousse a toutefois été très faible cet automne. »

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